1983-90
Ayo Manuel
Le Nigéria brille actuellement sur la scène mondiale musicale grâce au talent de ses artistes, mais il ne faut pas oublier que l’héritage musical du pays est beaucoup plus ancien. Et Soundway Records s’assure, ce mois-ci, que l’on garde en mémoire ce patrimoine en sortant la compilation 1983-90 de Ayo Manuel. L’artiste, pionnier du DIY nigérian a composé seul de grandes parties de ses albums. Soundway a sélectionné et compilé des titres de ses albums Love Candidate et Party Time, une belle manière de constater l’évolution de l’œuvre d’Ayo Manuel. D’un point de départ très disco-funk et chargé en synthétiseurs à un final plus équilibré et plus afropop, mixe agréable de productions propres aux années 90 et de tama (tambour parlant). Chaque son de la compilation possède son identité, comme « Gboro Mi Ro », qui se rapproche plus des tonalités de l’afrobeat de Fela Kuti, « Sojourn (Ajo) », réminiscence de productions américaines mais gardant l’esprit des rythmes nigérians. Un album qui nous permet de replonger dans l’univers mouvementé d’un artiste phare du Nigéria.
Écoutez ici.
ALÊM DO FIM
SÉKETXE
Les plus puissantes voix du rap angolais font leur retour avec un deuxième album ALÊM DO FIM. Un peu plus d’un an après FUNJADA, SÉKETXE revient percuter le rap. Et les 6 membres du groupe (Murtalha, Djamberão, Rasgdo, Layfado, Black Kokaina, Banzelo) n’ont pas perdu une once de talent. L’énergie qui les caractérise depuis le début de leur carrière persiste et le groupe n’hésite pas à s’aventurer sur des terrains musicaux moins balisés. Les rappeurs de Luanda avaient laissé apercevoir leur talent mélodique sur quelques sons comme « NGASSAKADILA » et réitère l’essai en allant plus loin sur « MUITO OBRiGADO » et sa production dansante survolée par un refrain chanté. Mais si ALÊM DO FIM marque l’esprit c’est avant tout pour les flows du groupe, aucun son ne se ressemble et chaque nouveau titre nous offre une nouvelle vision de ce groupe qui n’a pas fini de faire parler de lui.
Écoutez ici.
À table !
MechansT
Le repas est servi et c’est le rappeur haïtien qui nous y invite avec le fiévreux album À table !. Plus d’un an après le projet Ekstrateres, MechansT fait son grand retour et on peut dire qu’il a mis les petits plats dans les grands. Aussi bien à l’aise dans le rap que le chant, À table ! alterne entre ambiances calmes, dansantes et plus obscures. Le rappeur prouve qu’il peut tout aussi bien gérer une instru trap comme sur « Apa’w Tounen Gangster ? » qu’une production zouk avec « Sa’w Tap Fè? ». Une musicalité qui n’est pas rare dans le hip-hop haïtien mais MechansT se démarque avec des ajouts de chœurs particulièrement percutants comme sur « Pa kriye » ou encore sur « Nou VIe VIV ». Et même si l’artiste est un vrai couteau suisse du rap krèyol, il convie d’autres grands noms de la scène haïtienne comme Roody Roodboy. Un festin auditif qui permet de s’immerger dans une scène montante du hip-hop.
Écoutez ici.
Five Seasons
Itamar Klüger
Itamar Klüger nous fait remonter le temps avec l’imprévisible Five Seasons. L’artiste a composé l’album au fil des saisons et chaque titre capture l’énergie de la saison qui l’a vu voir le jour. Un premier album solo réussi pour le leader du groupe the Şatellites. Funk et rock se mêlent tout en voguant dans un univers sonique extrêmement étendu. La musique dabke levantine croise la musique bandari perse des mariages, la folk turque n’est pas sans reste et il reste de la place pour une once d’afrobeats, un soupçon de blues saharien et un zest d’indie rock. Five Seasons est un vaste terrain d’expérimentation qui porte en lui l’âme directe de la temporalité qui l’a vu naître. Le projet emporte son auditeur des rues bondées de Jaffa aux dunes du désert sans oublier de s’égarer en Jamaïque. Un album empli d’une sublime nostalgie.
Écoutez ici.
Lo-Life!
Immy Owusu
Immy Owusu nous emmène en plongée dans ses racines ghanéennes avec le vibrant Lo-Life!. Dans un style que l’artiste a nommé « Afrodelik » – pour englober ses sonorités afros et ses rythmes rock psychédéliques – il revisite le highlife ghanéen et le palm wine. Une fusion à l’image du chanteur qui a grandi en Australie avec le rock mais qui est issu d’une illustre famille d’artistes ghanéens, notamment son grand père Koo Nimo, grand nom du highlife. Né donc de cette union l’album Lo-Life, il ne manquait plus qu’Immy saupoudre le tout d’une once d’afrobeats pour aboutir à ce bijou sonore. Il est accompagné de musiciens des groupes Surprise Chef, Karate Boogaloo and The Senegambian Jazz Band. Une ode psychédélique et lo-fi au highlife portée par les paroles en twi d’Immy qui vous emporteront vers l’élévation.
Écoutez ici.
Marzipan (Habibi Funk 023)
Charif Megarbane
Voyage en plein cœur de Beyrouth avec Charif Megarbane et son album Marzipan. Une sortie placée sous le sigle du label Habibi Funk et qui signe d’ailleurs, la première sortie d’album contemporain pour le label spécialisé dans la réédition d’album du Maghreb et du Moyen-Orient. Un voyage mené non sans groove dans ce style que Megarbane a appelé « Lebrary » contraction de Liban (Lebanon) et de library music, cette musique de décor composée pour accompagner, les films, les documentaires, les émissions… Charif Megarbane a ainsi composé un album aux airs de bande originale ensoleillée. Une délicieuse funk orientale guidée par la marée d’instruments présents sur l’album et qui s’accompagnent à la perfection sans qu’aucun ne déborde sur les autres. L’artiste libanais crée avec Marzipan, un album contemplatif et contemporain sans pour autant abandonner le côté « habibi » qui a fait la réputation du label berlinois.
Écoutez ici.
Osapa London
PyschoYP
Le rappeur revient avec Osapa London un projet de 8 titres. PyschoYP y explore les genres musicaux populaires que sont l’amapiano, l’afrobeats et le dancehall sans pour autant perdre l’identité musicale de son rap. Une tentative d’atteinte du grand public plus que réussie. Le projet est aussi porté par un casting tiré à quatre épingles avec les présences d’Odumodublvck, de Teni ou encore de Laime apportant une fraîcheur aux couplets de PsychoYP. Une alchimie qui se ressent tout au long de l’EP, les saxophones et l’ambiance juju sur « AnyGaddamnTime » feront bouger vos hanches, la dose d’émotions est assurée avec « Stand Attention », « This Country » ouvre l’album et pose le décor. Osapa London est complet en sonorité et c’est assurément ce qui permet à tous de s’y retrouver.
Écoutez ici.
PANICO NO SUBMUNDO
DJ K
Et si la baile funk brésilienne rencontrait l’horrorcore ? Deux univers qui semblent opposés mais que DJ K propose d’unir sur son nouvel album au titre évocateur PANICO NO SUBMUNDO (Panique dans le monde souterrain). DJ K pousse le « Bruxaria » – genre né du baile funk à l’ambiance plus sombre avec ses drums et ses synthés saturés – à son paroxysme en y infusant l’horrorcore. La rencontre entre les rythmes dansants propres au Brésil et la BO du film Halloween. Un album qui pourrait être celui de l’apocalypse avec ses alarmes tonitruantes, ses ponctuations de basses battantes et ses rythmes se distordant au fil de l’écoute. Une énergie n’étant pas sans rappeler celle de la phonk qui revoit le goût du jour depuis quelques temps sur les réseaux sociaux. PANICO NO SUBMUNDO est un gigantesque chaos organisé, une folie sonore remplie de détails qui, contrairement à ce que l’on pourrait croire, sont arrangés minutieusement.
Écoutez ici.
Tony Allen JID018
Tony Allen
Le label Jazz is Dead, fondé par Ali Shaheed Muhammad (membre du groupe Jazz A Tribe Called Quest) et le producteur compositeur Adrian Younge, continue de redorer le blason du jazz. Pour la sortie de ce 18e volet, c’est le grand et regretté Tony Allen qui est à l’honneur. L’artiste, renommé pour son talent en tant que batteur dans le groupe Africa 70 de Fela Kuti, s’est rendu dans les studios de Jazz is Dead pour enregistrer ce nouvel opus. Résultat ? Un album empreint de cette patte reconnaissable entre mille et ayant contribué à poser les bases de l’afrobeat. Tony Allen louvoie entre le jazz et la funk, afrobeat et highlife nigérian, une énergie qui semble raviver les emblématiques sonorités d’Africa 70. L’artiste est à la basse, à la guitare électrique, au clavier et au marimba, il ne manquait plus que les cuivres, la flûte et l’orgue et voici l’enregistrement complet ! Jazz is Dead nous emmène dans un voyage psychédélique en royaume Yoruba. Un projet fort qui contribue à l’héritage laissé par un des plus grands batteurs du monde. Une chose est certaine, Tony Allen aura marqué durablement le monde de la musique et continuera d’influencer les musiciens du monde entier.
Écoutez ici.
When The Dust Settles
Balimaya Project
Balimaya Project a rendu palpable ce moment de flottement qui précède le changement, cette apnée avant d’entrer dans l’eau, sur le mouvant When The Dust Settles. Cela fait longtemps que PAM suit ce collectif à la musique forte de son ancrage entre culture mandingue et jazz anglais. Ce nouvel album est la belle continuité de Wolo So, une harmonie musicale qui explore des terrains sans cesse différents. Les tambours appellent, les saxophones répondent et la kora s’entremêle dans cet ensemble. Dirigé par Yahael Camara Onono, le collectif accueille les voix de Afronaut Zu, Obongjayar et Fassara Sacko pour un album qui marque déjà l’année. L’émotion est présente de la première à la dernière piste, la rythmique est ouest-africaine, l’énergie est anglaise, prenez place et savourez When The Dust Settles.
Écoutez ici.
